Pourquoi sécuriser ses mots de passe n’est plus une option
Ce n’est pas une surprise : un mot de passe faible, c’est comme une serrure en plastique sur la porte d’un coffre-fort. Dans un monde où les attaques informatiques se multiplient et où les fuites de données deviennent monnaie courante, se contenter de « azerty123 » ou « toto01 » relève presque de la négligence volontaire. Pour les particuliers comme pour les professionnels, la sécurisation des mots de passe est désormais une nécessité absolue.
Mais comment créer un mot de passe vraiment sécurisant, sans devoir le noter sur un post-it collé sous l’écran ? Voici une méthode rigoureuse, fondée sur la logique et l’efficacité, pour protéger vos accès en ligne sans sombrer dans la complexité paranoïaque.
Les erreurs classiques à éviter absolument
Commençons par les mauvaises habitudes. Et elles sont légion.
- Utiliser le même mot de passe partout : si un site est compromis, tous vos comptes le sont aussi. C’est l’effet domino, version cybersécurité.
- Choisir des mots de passe évidents : « password », « 123456 », votre date de naissance ou le prénom de votre chien ne trompent personne. Surtout pas les scripts automatisés des hackers.
- Ignorer les mises à jour : garder le même mot de passe pendant cinq ans, c’est comme ne jamais changer de serrure, même après une tentative d’effraction.
- Les stocker en clair : un fichier texte sur le bureau intitulé « motsdepasse.txt » ? Autant laisser la clé sous le paillasson.
Ces erreurs, nombreuses et pourtant évitables, sont l’une des premières portes d’entrée pour les cybercriminels.
Créer un mot de passe réellement robuste
Un bon mot de passe, ce n’est pas forcément long comme un roman, mais il doit respecter certains critères de base :
- Au moins 12 caractères (16, c’est mieux)
- Une combinaison de majuscules, minuscules, chiffres et caractères spéciaux
- Pas de mots du dictionnaire, ni noms propres
- Aucun lien direct avec votre vie personnelle (exit les prénoms de vos enfants)
Un exemple concret : P8h$r2Lmq!K9zW. Est-ce lisible ? Non. Est-ce efficace ? Oui. Peut-on s’en souvenir comme ça ? Absolument pas. Ce qui nous amène au point suivant…
Mnémoniques : générer des mots de passe sûrs sans les oublier
Créer un mot de passe complexe ne signifie pas qu’il doit être impossible à mémoriser. Voici une astuce inspirée des meilleurs practices en cybersécurité : la phrase secrète.
Prenez une phrase simple que vous seuls pouvez connaître, du style : « Mon fils Arthur est né en 2010, à Lille, à 23h ». Ensuite, gardez la première lettre de chaque mot, les chiffres, et ajoutez des caractères spéciaux pour complexifier le tout. Le mot de passe pourrait devenir : MfAen2010@L@23h. Facile à retenir pour vous, difficile à deviner pour les autres.
Autre astuce : utilisez des acronymes de phrases personnelles. Ex : « J’adore manger des crêpes au sucre avec mon chat Igor les dimanches » = J’amdc@samcIld.
La double authentification : un passage obligé
Nous sommes tous tentés de considérer que le mot de passe suffit. Mais c’est faux. Aujourd’hui, aucun mot de passe n’est inviolable. D’où l’importance de la double authentification (2FA). SMS, application d’authentification (comme Google Authenticator, Authy, ou Microsoft Authenticator), clé physique type YubiKey : chaque palier de sécurité supplémentaire rend la tâche exponentiellement plus difficile aux intrus.
Si vous vous connectez à votre boite mail, et qu’un code unique vous est demandé via votre téléphone, même un hacker ayant deviné votre mot de passe sera arrêté net s’il ne peut prouver qu’il est… vous.
Petit conseil au passage : préférez les méthodes d’authentification par application plutôt que par SMS, plus vulnérables aux attaques par SIM swapping.
Les gestionnaires de mots de passe : solution ou piège ?
Beaucoup redoutent de stocker tous leurs mots de passe dans une même « boîte ». Pourtant, les gestionnaires de mots de passe comme Bitwarden, 1Password ou Dashlane offrent aujourd’hui des garanties de sécurité bien supérieures à un fichier Excel caché dans un dossier nommé « vacances2017 ».
Avantages :
- Génération automatique de mots de passe forts et uniques
- Remplissage automatique sur navigateur ou mobile
- Chiffrement de bout en bout (vos données sont illisibles en cas de piratage du service)
La seule précaution ? Choisir un mot de passe maître vraiment solide. C’est le seul que vous aurez à mémoriser. Et oui, là aussi, appliquez les règles vues plus haut.
Faites néanmoins attention à bien choisir votre gestionnaire : privilégiez les services open source et transparents sur leur politique de sécurité. Et surtout, activez la double authentification aussi sur ce compte-là.
Changer ses mots de passe : quand, comment, pourquoi
Changer un mot de passe tous les mois ? Inutile et contre-productif. À moins d’avoir détecté un comportement suspect ou d’être sur un poste très exposé. En revanche, quelques bonnes pratiques à adopter :
- Après une suspicion de piratage : changement immédiat, sans délai.
- Après une fuite connue d’un service : consultez les listings publics (Have I Been Pwned) et vérifiez si vos e-mails sont concernés.
- Si vous avez partagé un mot de passe : une fois suffit, mais après, on change.
- Si vous n’avez pas modifié le mot de passe depuis plus de deux ans : une mise à jour ne fait jamais de mal.
Petite astuce pragmatique : faites un audit annuel de vos mots de passe, comme une révision de voiture. En janvier, par exemple. C’est l’occasion de remettre un peu d’ordre et d’identifier les failles potentielles.
Réseaux sociaux, messageries, e-commerce : les comptes à protéger en priorité
Certains comptes, s’ils sont compromis, peuvent avoir des conséquences bien plus graves que d’autres. Voici ceux auxquels vous devez accorder une attention particulière :
- Messagerie principale (email) : souvent utilisée pour récupérer les accès à tous vos autres comptes.
- Banque et finance : votre argent mérite mieux qu’un simple « Coucou2023 ».
- Comptes professionnels : violation de confidentialité, fuite de données sensibles, atteinte à votre réputation.
- Réseaux sociaux : un piratage peut vite devenir embarrassant voire dangereux (usurpation d’identité, harcèlement, etc.).
Appliquez une sécurité maximale à ces comptes-là. Ce sont les piliers de votre identité numérique.
Alerte sur les mots de passe partagés
« Donne-moi ton mot de passe Netflix » : cette demande anodine est devenue virale. Mais à force de partager nos accès, on finit par les perdre vraiment. Chaque personne à qui vous donnez un mot de passe devient un point de vulnérabilité supplémentaire. Et si cette personne le réutilise ailleurs avec le même identifiant, vous ne contrôlez plus rien du tout.
Une solution ? Les accès partagés chiffrés proposés par certains gestionnaires de mots de passe. De cette manière, vous pouvez partager une connexion sans révéler le mot de passe lui-même. Simple, malin, sécurisant.
Quelques outils utiles pour aller plus loin
Pour les plus rigoureux d’entre vous (et vous avez raison de l’être), voici une sélection d’outils éprouvés :
- Have I Been Pwned : vérifie si votre email ou mot de passe a déjà fuité.
- Password Monster : estime la robustesse d’un mot de passe.
- Bitwarden : gestionnaire de mot de passe open source.
- Authy : application de double authentification multi-supports.
Parce que dans un monde où l’essentiel de nos vies passe par le numérique, défendre ses mots de passe, c’est défendre son identité.
Sécuriser ses mots de passe ne demande ni expertise, ni matériel complexe, juste un peu de méthode, une bonne dose de bon sens et les bons outils. Le plus grand danger ? C’est de croire que ça n’arrive qu’aux autres.